Le temps était aux catastrophes : les giboulées de mars tombaient en avril, le pollen
affectait nos gorges et notre restaurant habituel, « l’Absinthe » nous était fermé, ayant,
il y a quelques jours, subi un incendie. Clotilde, dans l’urgence, démarcha un nouvel
établissement. Ce fut la brasserie « les Arts et Métiers », sur la place et la station de
métro éponymes.
Je traversai la terrasse extérieure, puis la terrasse intérieure. J’entrai dans la salle,
vaste, décorée de tentures rouges, avec pour mobilier, tables basses et poufs
confortables. Contre les murs, des écrans de télévision diffusaient sans discontinuité
des programmes inintéressants et que personne, d’ailleurs ne regardait. J’y lus un
mauvais présage sur la soirée à venir.
Hôtesse parfaite, Clotilde, en tenue noire parfaite, acceuillait les convives avec son
sourire engageant autant que charmant. Belle coiffure noire geai avec mèches
courbes encadrant son joli minois, Virginie Perle dialoguait avec Erika, accompagnée
de Emiko, son amie, et une connaissance commune, Mala. Adriana, en jupe légère à
volants et bottes assorties avec de mêmes volants, était venue avec Frédérique, un
ami d’enfance. Magaly, toute en rouge suggestif, conversait avec Diane, copine
normande portant gilet bordeaux ceinturée de scintillant et jupe de jean. Ancienne
libraire et toujours collectionneuse de livres rares avec enluminures, Sylvie avait osé
une longue robe noire ajourée et j’eus avec cette aimable personne un échange
passionnant. Un échange entre bibliophiles.
Patrick se renseignait sur les premiers pas à entreprendre pour la métamorphose que
vous devinez. Il lui fut répondu qu’avant tout, il faut dans la tête « avoir le déclic ». Le
mental, ma chère, tout est dans le mental… Lydie, en robe noire, avait ôté son
superbe manteau à motifs noirs, blancs et gris, entrelacés joliment. Marie-Pierre,
portant vêtements d’homme, se faisait donc prénommer Pierre-Marie et nous
sommes bien les seules à savourer ces jeux transgenres dans leurs vertiges
fascinants. Jacqueline Joly, plus blonde que la blonde Maryline, minaudait, tanguait,
posait en robe moulante noire avec ceinture de métal argenté.
Apéritifs, entrées, plats ou desserts, nous constatâmes que plus notre diner
s’acheminait vers sa fin, plus la musique se faisait plus forte. A plusieurs reprises,
Jacqueline Joly demanda courtoisement à la jeune serveuse de baisser le son,
laquelle expliqua que c’était impossible. Au café digestif, l’ambiance sonore se fit
éprouvante, pénible, insupportable. Pour les restaurateurs plus attachés à leur caisse
qu’au bon accueil des clients dans leur établissement, cela s’appelle « faire tourner les
tables ». C’était bien une autre catastrophe. Quant à moi, je ne reviendrai pas une
seconde fois en ces lieux : d’abord pour protéger mon ouïe, ensuite ne plus être prise
pour une vache à euros.
Clotilde nous dénichera bien un restaurant qui conjugue bonne table et bon
environnement. De telles enseignes ne manquent pas sur Paris et si vous en
connaissez une, vous nous le signalerez, vite. Vous veillerez début mai le courriel
d’invitation de Clotilde et consulterez le site. Au besoin, vous contacterez notre amie
organisatrice les jours précédents notre prochain repas mensuel.
Rendez-vous est pris pour le vendredi 11 mai 2012.